Nous avons demandé à des professionnels de la santé quels étaient les symptômes qu’ils considèrent comme préoccupants, ce qu’ils appellent, eux, des signes d’alerte. Ces symptômes, même s’ils ont parfois l’air anodins, justifient toujours une visite chez le médecin.
1. Fièvre persistante, sueurs nocturnes et perte de poids inexpliquée
Ces symptômes systémiques (c’est-à-dire qui affectent tout le corps) apparaissent parfois en triade – on les appelle alors «symptômes B», surtout dans le contexte de certains cancers des ganglions lymphatiques. S’il est inutile de se précipiter à l’urgence à la moindre poussée de fièvre, une élévation de la température corporelle qui persiste à plus de 38°C et s’accompagne d’une perte de poids inexpliquée et de sueurs nocturnes abondantes peut aiguiller vers un cancer, notamment un lymphome hodgkinien.
2. Enflure persistante des ganglions
Un gonflement des ganglions est l’indice que le système immunitaire combat quelque chose, comme un rhume ou une infection, et il disparaît habituellement en quelques jours. Si, au contraire, les ganglions restent enflés pendant des semaines et continuent d’augmenter de volume au point d’être détectables par un simple examen visuel, il faut procéder à d’autres évaluations, selon la Dre Johanne Blais, médecin de famille à l’hôpital Saint-François d’Assise de Québec. On peut avoir affaire à une banale infection, mais une enflure persistante, par exemple des ganglions du cou, pourrait indiquer un cancer de la bouche ou de la langue, ou même un cancer du sein.
3. Un grain de beauté pas comme les autres
C’est le principe du «vilain petit canard»: comme nos grains de beauté ont tendance à se ressembler, toute tache ayant un aspect différent des autres peut être considérée comme suspecte. Le Dr Denis Okan, médecin généraliste à la clinique d’oncologie Agatha, à Montréal, conseille de prendre une photo de la tache en question à côté d’un objet de référence, un 10 cents par exemple, puis d’en prendre une deuxième un mois plus tard pour voir si elle a évolué.
4. Plaie qui ne guérit pas
Une lésion qui suinte, fait des croûtes et change d’apparence ou ne guérit pas normalement peut être l’indice d’un cancer de la peau. La Dre Andrea Somers, urgentologue au Réseau de santé universitaire (University Health Network) de Toronto, précise que, bien que ces lésions puissent apparaître sur n’importe quelle partie du corps, celles qui sont plus exposées au soleil, comme le visage, le cou et les bras, sont plus souvent affectées.
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5. Changement dans l’apparence des seins
Si la peau semble plus chaude, plus épaisse, plissée ou capitonnée comme celle d’une orange, il faut en parler à son médecin pour exclure un cancer du sein, prévient la Dre Somers. On reste également à l’affût de tout changement du mamelon, tels une inversion ou un écoulement.
6. Saignement rectal
Il ne faut pas forcément s’en inquiéter, mais il vaut mieux consulter. La plupart du temps, il ne s’agit que d’hémorroïdes, ou d’une petite coupure», précise le Dr Okan. Mais cela peut aussi être le signe d’affections graves, notamment un cancer colorectal. Chez les femmes, ce dernier vient au troisième rang des cancers les plus mortels au pays (après les cancers du poumon et du sein), selon la Société canadienne du cancer. Un diagnostic précoce améliore de beaucoup les chances de survie. C’est pourquoi on recommande à tous les adultes de plus de 50 ans, même s’ils n’ont aucun symptôme, de subir tous les deux ans un test de dépistage, qui consiste à rechercher la présence de sang dans les selles.
7. Selles noires
Une coloration noire charbonneuse peut être causée par un ulcère ou un cancer du système digestif. Il faut en parler à son médecin sans tarder, même si de nombreux facteurs bénins peuvent aussi changer la couleur des excréments, comme la consommation de betteraves, de suppléments de fer ou de certains médicaments. «C’est très commun, dit le Dr Okan. Les gens avalent du Pepto-Bismol après une gastro, puis ils viennent me voir parce qu’ils sont inquiets.»
8. Crachats teintés de sang
Ce signe peut annoncer un cancer du poumon ou une embolie pulmonaire. «C’est moins inquiétant après un saignement de nez, quand c’est simplement du sang qui est retombé dans l’arrière-gorge, explique le Dr Okan. Une autre cause possible est que de petits vaisseaux sanguins aient éclaté après une toux violente ou un vomissement.»
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9. Sang dans l’urine
C’est le principal symptôme du cancer de la vessie, dont le risque est considérablement augmenté chez les fumeurs. D’autres maux peuvent être en cause, comme une infection urinaire ou des pierres aux reins. «Mais ce peut être aussi un simple cas de déshydratation, souligne le Dr Okan. Par exemple, l’urine des coureurs après un marathon est tellement foncée qu’elle prend parfois une couleur Coca-Cola presque sanguine.»
10. Saignement vaginal après la ménopause
Selon la Dre Somers, tout saignement postménopausique, même léger, doit être pris au sérieux. Les causes peuvent être bénignes, un fibrome ou un traitement hormonal, par exemple, mais il peut également s’agir d’un cancer utérin. «C’est le plus répandu des cancers de l’appareil reproducteur féminin, précise-t-elle. Nous n’en parlons pas assez.»
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11. Palpitations accompagnées de faiblesse
Elles peuvent être banales. «Tout le monde a des battements de cœur irréguliers de temps en temps», dit le Dr Michel White, cardiologue et chercheur clinicien à l’Institut de cardiologie de Montréal. Toutefois, si on souffre aussi d’étourdissements, il y a peut-être un problème de la circulation du sang, du muscle cardiaque ou de l’activité électrique du cœur.
12. Diminution soudaine de la tolérance à l’effort
Le cœur pourrait être en cause. «Chez quelqu’un qui a toujours été actif et qui remarque que, en l’espace de quelques semaines, sa tolérance à l’effort a diminué et que son souffle est beaucoup plus court, on suspectera une maladie des artères», indique le Dr White.
13. Une douleur au thorax qui apparaît à l’effort et disparaît au repos
On pense à l’angine de poitrine, un ensemble de symptômes causés par l’obstruction d’une ou de plusieurs artères du cœur. L’angine peut aussi être déclenchée par une émotion forte. En matière de maladie cardiaque, «avant la ménopause, les femmes sont quand même protégées par les œstrogènes», fait observer le Dr White. «Après, elles deviennent aussi à risque que les hommes. Sur un étage de cardiologie, chez les plus de 60 ans, on a autant de femmes que d’hommes», dit-il.
14. Douleurs abdominales après un repas riche en gras
Ce symptôme évoque une cholécystite, c’est-à-dire une inflammation de la vésicule biliaire, plus fréquente chez les femmes que chez les hommes.
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15. Un violent mal de tête au réveil
Cela pourrait être symptomatique d’une tumeur qui exerce une pression sur le cerveau même la nuit (alors que la majorité des céphalées sont dues à une tension musculaire, qui s’estompe avec le sommeil). «Évidemment, la plupart des maux de tête n’ont rien à voir avec un cancer, nuance le Dr Okan. Mais si d’autres signaux d’alerte sont présents – par exemple, le fait que le mal de tête soit inhabituel ou s’accompagne de nausées –, il faudra procéder à un examen IRM (imagerie par résonance magnétique) pour en avoir le cœur net.»
16. Mal de tête déclenché par un effort
Le mal de tête survient pendant ou après un effort physique – une activité sportive aussi bien qu’un rapport sexuel, un effort de défécation ou une quinte de toux. Plusieurs scénarios sont possibles, parmi lesquels une méningite, une tumeur cérébrale, une simple migraine ou autre chose encore. Quoi qu’il en soit, «on préfère toujours que les gens consultent dans ce cas-là», souligne la Dre Johanne Blais.
17. Perte momentanée de la vue
Une impression de rideau noir qui recouvre brièvement un seul œil suggère une possible ischémie cérébrale transitoire (ICT), selon le Dr Dufour. Celle-ci peut également se manifester par une difficulté temporaire à articuler ou à trouver ses mots. L’ICT est liée à une diminution de l’apport sanguin au cerveau et doit être traitée rapidement, parce que «le risque de souffrir d’un accident vasculaire cérébral (AVC) dans les mois qui suivent ce type de symptôme augmente de façon exponentielle», prévient-il.
18. Difficulté à respirer après un long vol en avion
On soupçonne une embolie pulmonaire. Même chose si l’on ressent une vive douleur au thorax après avoir été cloué à son siège d’avion ou de bus pendant des heures, ou après un alitement prolongé à cause d’une hospitalisation ou d’une chirurgie importante, par exemple.
19. Soif et faim excessives
Ces symptômes accompagnés d’un fréquent besoin d’uriner, d’une perte de poids inexpliquée et de fatigue évoquent un diabète de type 2 avancé. Ils se manifestent parfois si graduellement que de nombreuses personnes vivent avec la maladie pendant des années sans s’en rendre compte. Les femmes de plus de 50 ans ménopausées ont tout intérêt à être vigilantes parce qu’elles sont plus à risque, selon May Faraj, directrice de l’unité de recherche en nutrition, lipoprotéines et maladies cardiométaboliques de l’Institut de recherches cliniques de Montréal.
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20. Douleur au mollet déclenchée par la marche
Une sensation de crampe au mollet qui survient à la marche et s’estompe au repos peut signaler une maladie vasculaire appelée claudication intermittente. Une artère bouchée en est souvent l’origine. «C’est une douleur répétitive, qui réapparaît toujours après une même distance de marche et la même intensité d’effort», explique le Dr Robert Dufour, directeur associé de la clinique de prévention cardiovasculaire de l’Institut de recherches cliniques de Montréal.
21. Enflure d’une seule jambe
Un peu de rétention d’eau, ce n’est pas forcément alarmant. «Mais si une jambe est beaucoup plus enflée que l’autre, il faut s’assurer que ce n’est pas causé par un caillot sanguin», affirme l’urgentologue Andrea Somers. Les caillots risquent de remonter dans la circulation veineuse vers le cœur et de provoquer une embolie pulmonaire, parfois fatale.
22. Insomnie
C’est l’un des symptômes les plus fréquents de la dépression, une piste encore plus plausible s’il y a simultanément perte ou prise de poids, ou changement de l’appétit. Mais attention, «si l’insomnie est accompagnée d’irritabilité et d’une difficulté à se concentrer, il peut s’agir de périménopause ou de ménopause», précise la Dre Johanne Blais.
23. Changements de personnalité
La personnalité n’est pas immuable. Mais un changement notable, involontaire, peut laisser augurer un problème. «La démence n’est pas seulement associée à un déclin cognitif, c’est aussi comportemental», explique Jordan Fish, conseiller à la Société Alzheimer de Montréal. Un proche peut, par exemple, abandonner des activités qui lui sont chères, devenir irritable ou s’isoler. En détectant la maladie à ses premiers stades, on peut aider la personne qui en souffre plus rapidement, «ce qui est important parce que les médicaments sont moins efficaces après une certaine fenêtre de temps optimale», souligne Jordan Fish.
24 Indécision chronique
Qui n’est pas indécis une fois de temps en temps? «C’est normal, mais il faut s’en préoccuper si ça devient de plus en plus fréquent à propos de choses banales», dit Stéphane Bensoussan, psychologue. Dans certains cas, ça annonce un début de psychose, de trouble bipolaire ou de dépression.
25. Dévouement, oubli de soi-même
Être mère serait donc une pathologie? «C’est vrai que cela se voit davantage chez la femme, concède Stéphane Bensoussan. “Je donne, je donne, et je ne fais rien pour moi.” Ça crée un genre de ressentiment, une perte d’estime de soi qui mine la qualité de vie», explique-t-il. Cette tendance est parfois un signe avant-coureur de dépression ou de burn-out.
Nos experts
Stéphane BensoussanPsychologue, auteur de Mieux vivre avec le cancer (Les Éditions de l’Homme)Dre Johanne BlaisMédecin à l’Unité de médecine familiale du CHUQ, à l’hôpital Saint-François d’Assise, à Québec, conférencière et coauteure de Être femme à 40 ans, Être femme à 50 ans et Être femme à 60 ans (tous publiés aux Éditions des Intouchables)Dr Robert DufourDirecteur associé de la clinique de prévention cardiovasculaire de l’Institut de recherches cliniques de MontréalMay Faraj
Directrice de l’unité de recherche en nutrition, lipoprotéines et maladies cardiométaboliques de l’Institut de recherches cliniques de MontréalJordan FishConseiller à la Société Alzheimer de MontréalDr Denis OkanMédecin généraliste à la clinique d’oncologie Agatha, à MontréalDre Andrea SomersUrgentologue au Réseau de santé universitaire (University Health Network) de TorontoDr Michel WhiteCardiologue et chercheur clinicien à l’Institut de cardiologie de Montréal
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