Notre rencontre est pour rendre hommage à l'ancien animateur de DP , M. Jean Paul St Germain de la diocèse de Sherbrooke. Il a accompagné notre conseil diocésain (CD) de l'Estrie durant plusieurs années et a travaillé à Développement et Paix durant plus de trente ans.
Le comité organisateur de cette activité: Yvonne Bergeron, Lise Laroche, Line Coutu, Janot Brochu, Gaétane Gagné et Ghislaine Beaulieu a choisi le 2-12-2022 pour fêter également Noel avec plusieurs membres de DP.
Une fête tant attendue....
Merci Irène pour les chants de Noel
Texte de Janot Brochu *
C'était une rencontre très chaleureuse et amicale
KĐ
*
ET L'ÉTOILE ALLAIT DEVANT...
Vous ne croirez peut-être pas, l'histoire qu'on m'a racontée!
Le plus sombre de visage venait de l'Afrique. Balthasar, sa famille la
plus riche de la région, était chef de père en fils.
Cette année-là, il y eut une grande sécheresse, on avait tout essayé:
danses rituelles, incantations, sacrifices plus ou moins nombreux. Peine
perdue.
Les ressources s'épuisaient.
Balthasar avait acquis une conviction: " Il devait se mettre en route."
Un soir assis non loin de sa case, aux lueurs des
premières étoiles, il vit un astre nouveau qui bougeait,
qui avançait, astre si petit que s'il n'avait pas bougé,
personne ne l'aurait remarqué. L'étoile lui faisait comme
un signe, elle l'invitait à la suivre.
Comme il se dirigeait vers sa case pour se préparer, il lui vint tout à coup
à la mémoire, un vieux dicton qui lui avait toujours paru étrange:
"Heureux les pauvres."
Balthasar se mit à déterrer sa caissette d'or qu'il avait enterrée dans sa
case tout en marmonnant :"Heureux les riches"
Balthasar emportait pourtant avec lui la détresse de toute sa tribu.
"Heureux les pauvres" son grand-père lui avait appris que dans un
dialecte ancien le mot "Heureux" signifie aussi "En route"
À l'approche d'une ville importante, l'étoile s'arrêta. Parmi la foule
grouillante, il remarqua un homme grand, teint basané, un point rouge
sur le front entre les deux yeux. L'inconnu d'abord hésitant, lui raconta
son histoire: il s'appelait Gaspard, un brahmane du nord de l'Inde
appartenant à la caste la plus prestigieuse de la société indoue. Gaspard
respectait la stricte ascèse, étant brahmane, ayant été élevé dans le
respect strict des différentes castes, toute sa vie entière il n'avait pas eu
de contact avec une personne de caste inférieure. L'odeur de sa personne
était celle des temples indous. Gaspard montra à Balthasar ce qu'il
portait dans le pan de sa robe de couleur safran: de l'encens.
2
Pourquoi Gaspard était-il parti? Depuis longtemps il ne supportait pas
l'isolement où le maintenait sa condition de brahmane. Un soir au sortir
du temple où il avait déposé son offrande, il avait levé la tête en quête
des signes annonciateurs de la mousson: il avait vu l'étoile qui émanait
d'elle. Une sorte de persuasion : Gaspard n'avait pas hésité, il était parti.
Dans le brouhaha de la grande ville, Balthasar entendit des propos où il
était question d'une étoile, du roi Hérode et d'un mage babylonien qui
avait été invité à la cour. En tant que témoins, Balthasar et Gaspard
avaient eux aussi vu l'étoile.
Melchior, c'était le nom du mage, n'en croyait pas ses yeux, l'étoile lui
donnait la certitude que s'ils étaient " trois" à voir cette étoile, c'est
qu'effectivement un grand personnage était né. Comme il était
astrologue de la Perse, il avait jadis déjà entendu des exilés juifs lui
parler de signes qui accompagneraient la venue de leur Messie: qu'il
serait roi des Juifs et qu'il devait naître à Bethleem.
Pour Hérode, cela était intolérable: cet enfant menaçait la sécurité de
son Royaume. Cette réaction réveilla la mémoire de Melchior qui avait
déjà été révolté en sortant du temple de sa ville, à la vue d'une scène
pourtant quotidienne: un homme était roué de coups pour avoir critiqué
le Roi: colère aveugle : comment un peuple, avec une civilisation aussi
raffinée qu'est la Perse, avait pu engendrer la dictature qui aujourd'hui
muselait son peuple. Melchior avait de la peine à respirer et un mot
revenait sans cesse à ses lèvres : OPPRESSION.
Au sortir de la ville, l'air semblait "embaumée" Melchior ôta son turban
où il avait caché la myrrhe: ce baume qui calme la douleur. "Chez-nous,
dit-il, c'est une denrée très coûteuse."
Ils arrivèrent à Bethleem aux premières lueurs du jour: " La maison du
pain" murmura Melchior, les larmes aux yeux et qui savait l'origine des
mots.
Balthasar pensait à sa tribu qui mourait de faim.
Gaspard imaginait le désespoir de sa famille si elle l'avait vu ces jours-
ci partager sa vie quotidienne avec des intouchables.
Melchior trouvait ridicule le roi Hérode, si puissant, qui avait peur d'un
enfant: l'oppression, encore, par delà les frontières, alors ici aussi,
régnait la peur et un régime de terreur!
3
L'atmosphère s'alourdit: chacun sentait peser sur lui le poids d'une
chose trop lourde pour un seul homme!
Gaspard s'écria: "L'ÉTOILE S'EST ARRÊTÉE"
Tous les trois surent que leur long voyage prenait fin, qu'il prenait sens.
Là, dans cette maison, ils allaient comprendre. Et cela suffisait pour les
faire déborder de joie!
Quand ils virent l'enfant, c'était comme s'ils continuaient à voir l'étoile,
plus petite, plus insignifiante, mais plus pressante que jamais: "toi, toi
et toi, suis-moi" ... Pourtant l'enfant ne disait rien, pas plus que l'étoile.
Simplement, la clarté qui émanait de lui exerçait une attirance
indescriptible: les trois voyants comprirent que, désormais, ils
vivraient de cette clarté-là et qu'à leur tour, leur clarté inviterait
d'autres personnes à se mettre en route.
En ouvrant sa caissette d'or, Balthasar comprenait enfin, "heureux les
pauvres": heureux les pauvres parce qu'ils savent partager! Et c'est
tout un gisement d'or que Balthazar trouvait au fond de son coeur en
découvrant la joie du partage.
Pour sa part, en ouvrant son trésor d'encens, Gaspard se laissait
toucher jusqu'au fond par cet enfant intouchable, comme si l'encens, au
lieu de monter vers son Dieu, était descendu en lui pour lui rendre le
parfum enivrant de la vie en communauté; en présence de l'enfant de
lumière, l'encens pouvait aller et venir entre son Dieu et lui, mais aussi
entre brahmanes et autres êtres humains. Dans le plus grand silence,
il reçut une parole étonnante: "Heureux! En route ceux qui ont faim et
soif de justice."
Melchior, lui, en ouvrant son turban, sentait monter un apaisement
qu'aucune myrrhe au monde n'aurait pu lui procurer. C'était un baume
de douceur sur son coeur... Devant l'enfant de lumière, les menaces
d'Hérode se dissipaient comme odeurs de mort chassées par le vent.
La parole de douceur qui venait habiter en lui le mettrait désormais
hors d'atteinte, au sein des pires oppressions. Cette parole de douceur
venait de très loin, elle avait le goût de liberté. Melchior la sentit
prendre corps au plus intime de sa chair: "Heureux! En route les doux,
ils auront la terre en partage."
4
Cette nuit-là, les trois voyants comprirent qu'ils devaient prendre un
"autre chemin". L'enfant de lumière, sans un seul mot, venait de les
détourner de la route qu'Hérode leur avait tracée. Sans un seul mot, il les
avait"con-vertis".
Source du conte : Lytta Basset : Méditations de pleine confiance. 2004, sous
le titre AUBE
Résumé préparé par Janot Brochu
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