Vieillissement du tube digestif
L’appareil digestif est un ensemble vital d’organes responsable de la décomposition des aliments en composants utilisés par le corps. En vieillissant, le risque d’un dysfonctionnement de l’appareil digestif continue de croître en raison de nombreuses années d’exposition aux effets de facteurs tels que l’alimentation, le mode de vie, les maladies et les médicaments. De nouveaux problèmes médicaux peuvent survenir chez l’aîné, tels que la diverticulose colique ou le cancer colorectal, et des affections de longue date telles que la dyspepsie, le syndrome de l’intestin irritable, la maladie inflammatoire de l’intestin (maladie de Crohn et colite ulcéreuse), la maladie cœliaque et le RGO pathologique, peuvent empirer.
Nous examinerons les façons de maintenir une bonne santé digestive en vieillissant et discuterons des troubles qui touchent couramment les personnes plus âgées, ainsi que le traitement et la gestion de ces affections.
Modifications à l’alimentation et au mode de vie
Le maintien d’habitudes alimentaires saines peut offrir de grands bienfaits à votre santé digestive générale. Choisissez des aliments nutritifs comme l’indique le Guide alimentaire canadien et consommez-en une variété de chaque groupe alimentaire. Il est important de consommer suffisamment de fibres afin d’exercer une influence positive sur la constipation, la diarrhée et la diverticulose colique. Les femmes âgées de plus de 50 ans devraient viser une quantité de 21 g de fibres par jour, tandis que les hommes du même groupe d’âge devraient en consommer 30 g. Il est également essentiel d’obtenir une quantité suffisante de vitamine D, surtout pendant l’hiver, cette quantité augmentant avec l’âge. Les personnes âgées de 51 à 70 ans devraient prendre 400 IU (10 microgrammes) de vitamine D par jour et celles de 71 ans et plus devraient en prendre 600 IU (15 microgrammes) par jour. Les suppléments sont absolument nécessaires puisqu’il existe très peu de sources alimentaires de cette vitamine et nous ne sommes pas exposés de façon adéquate aux rayons du soleil tout au long de l’année de manière à pouvoir synthétiser notre propre vitamine D. L’apport en calcium est aussi très important chez les personnes âgées – elles devraient en obtenir 1 200 mg par jour en consommant trois portions de produits laitiers ou en prenant des suppléments.Il est important de demeurer actif tout au long de la vie. Une personne âgée de plus de 50 ans devrait pratiquer au moins deux heures et demie d’activité aérobique d’intensité modérée à élevée chaque semaine, répartie tout au long de la semaine en séances de dix minutes ou plus chacune. Cela peut comprendre des activités telles que la marche, le cyclisme et la natation. Ajoutez des activités de renforcement des muscles et des os au moins deux fois par semaine, comme l’entraînement avec des poids, les exercices avec des bandes de résistance, le jardinage vigoureux ou le yoga.
Dormir suffisamment peut aussi avoir des effets bénéfiques sur la santé digestive et sa fonction. Essayez d’obtenir 7 ou 8 heures de sommeil et d’établir un horaire dans le cadre duquel vous vous couchez et vous vous réveillez à la même heure chaque jour. Le stress peut contribuer à l’aggravation de symptômes digestifs, et bien que cela soit plus facile à dire qu’à faire, des efforts d’atténuation du stress peuvent aider au maintien d’une bonne santé. Faire de l’exercice régulièrement, prendre du temps pour vous, rire de bon cœur, apprendre à mieux respirer et surveiller les pensées négatives sont des exemples de techniques de gestion du stress.
Dysphagie
Les difficultés de déglutition (la dysphagie) sont courantes chez les personnes âgées. Les éléments qui y contribuent sont notamment une production réduite de salive, une diminution de la force du sphincter œsophagien supérieur, une dégénérescence des nerfs et des muscles (un résultat commun découlant de la maladie de Parkinson ou d’un accident vasculaire cérébral), et une coordination réduite du processus de déglutition. Ces symptômes deviennent plus courants avec l’âge. Si vous éprouvez des difficultés à avaler, vous pouvez essayer quelques techniques pour alléger les symptômes. Bien mastiquer, maintenir une bonne santé bucco-dentaire, porter des prothèses dentaires bien ajustées, manger lentement et s’asseoir droit en mangeant peuvent tous aider.
Dyspepsie fonctionnelle
La dyspepsie fonctionnelle (DF) est un trouble chronique de la sensation et du mouvement (péristaltisme) du tube digestif supérieur qui touche de 20 à 45 % de la population. Parmi les symptômes on compte la douleur récurrente dans la partie supérieure de l’abdomen, les nausées, les éructations, le ballonnement, une sensation précoce de plénitude et l’indigestion. La cause de la dyspepsie fonctionnelle est inconnue; toutefois, plusieurs hypothèses pourraient expliquer cette affection, même si aucune d’entre elles ne peut y être systématiquement associée. Chacun des facteurs suivants a ses partisans : sécrétion excessive d’acide, inflammation de l’estomac ou du duodénum, allergies alimentaires, influences du mode de vie et de l’alimentation, facteurs psychologiques, effets secondaires des médicaments (notamment des anti-inflammatoires non stéroïdiens [AINS] comme l’ibuprofène, le naproxène et l’aspirine) et infection par Helicobacter pylori.
Reflux gastro-œsophagien pathologique
Le reflux gastro-œsophagien (RGO) pathologique se manifeste lorsque la partie supérieure du tube digestif ne fonctionne pas bien, laissant le contenu de l’estomac remonter dans l’œsophage. Le symptôme le plus courant du RGO est le reflux acide, tandis que les autres symptômes comprennent les brûlures d’estomac, la régurgitation d’acide ou de nourriture, un mal de gorge persistant, une toux chronique, une douleur thoracique et une mauvaise haleine. De 13 à 29 % des Canadiens connaissent des symptômes récurrents.
Gestion de la dyspepsie et du RGO
La gestion de ces deux troubles du tube digestif supérieur est semblable. Elle consiste en une combinaison de modifications à l’alimentation et au mode de vie, et de médicaments au besoin. Il est important de trouver quels sont vos aliments déclencheurs, c’est-à-dire les aliments qui aggravent vos symptômes lorsque vous les consommez. Des aliments déclencheurs courants dans la DF et le RGO sont les aliments gras, les épices, l’alcool et la caféine, mais étant donné que chaque personne est unique, certains de ces aliments peuvent ne pas exercer d’effets négatifs sur vous, tandis que d’autres le peuvent. Éviter ces aliments, ou les consommer en petites quantités seulement peut aider dans la gestion des symptômes. Maintenir un poids santé et cesser de fumer ou réduire la consommation de cigarettes peut aussi aider puisque l’obésité et la nicotine peuvent contribuer au mauvais fonctionnement du sphincter œsophagien inférieur. Évitez de vous allonger tout de suite après avoir mangé et élevez la tête du lit de six pouces pour dormir.
Il y a deux types principaux de médicaments qui aident à réduire les brûlures d’estomac. Le premier type comprend les médicaments qui neutralisent l’acide, comme Maalox®, Tums® et Pepto-Bismol®. Ils sont généralement utilisés à court terme (deux semaines ou moins). Le deuxième type compte les médicaments qui inhibent la sécrétion de l’acide et qui sont utilisés pour la gestion à long terme du RGO. Ils comprennent les antagonistes des récepteurs H2 ou anti-H2 (Pepcid®, Tagamet®, Zantac®) et les inhibiteurs de la pompe à protons ou IPP (Losec®, Pantoloc®, Prevacid®, Nexium®, Tecta®, Dexilant®).
Complications induites par les AINS
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont un type de médicament qui soulage la douleur. Parmi les plus courants on compte l’acide acétylsalicylique (Aspirin®, ASA), l’ibuprofène (Advil®) et le naproxène (Aleve®). Quoique les AINS soient des médicaments efficaces pour le soulagement de la douleur et que leur profil d’effet secondaire est faible, ils peuvent occasionner des dommages du tube digestif supérieur. En vieillissant, le risque de développer des complications comme des ulcères gastriques augmente. D’autres facteurs de risque comprennent l’utilisation fréquente ou de doses élevées d’AINS, un saignement GI préalable, l’emploi concomitant de stéroïdes, une maladie cardiovasculaire et l’emploi d’un mélange de plusieurs AINS. Afin de prévenir les dommages gastro-intestinaux par les AINS, vous pouvez prendre certains médicaments tels que les anti-H2 et les IPP, qui réduisent l’acide gastrique, ou un agent qui agit comme barrière pour la muqueuse (Sucralfate®) afin de protéger l’estomac contre l’acide. Il existe aussi d’autres options d’AINS comme les inhibiteurs COX-2 (Celebrex®), mais ceux-ci comportent leurs propres risques. Si aucune de ces options ne fonctionne, vous pourriez envisager de limiter ou d’éviter les AINS. Si vous avez des inquiétudes au sujet de l’utilisation d’AINS et de leurs complications potentielles, veuillez consulter votre médecin.
Habitudes intestinales – Qu’est-ce qui est normal?
Les habitudes intestinales normales varient d’une personne à l’autre; l’important c’est donc de se concentrer sur son propre niveau de confort. De façon générale, il est considéré normal d’aller aux selles autant que trois fois par jour jusqu’à aussi peu que trois fois par semaine. Cependant, si vous vous retrouvez à l’intérieur de ces limites, mais que vous connaissez des symptômes désagréables, ces habitudes pourraient ne pas être normales pour vous. D’autre part, si vous vous retrouvez à l’extérieur de ces limites sans connaître d’autres symptômes, cela pourrait ne pas représenter un problème pour vous. Le passage des selles devrait se faire sans difficulté ou douleur, les selles n’étant pas trop molles ou aqueuses, ni trop dures et grumeleuses. Vous ne devriez pas avoir à exercer un effort et quand vous ressentez une envie, elle ne devrait pas être inconfortablement urgente.
Diarrhée
La diarrhée se produit lorsque le tube digestif achemine son contenu trop rapidement (temps de transit colique rapide). Cela signifie que le côlon n’a pas le temps de retirer une quantité adéquate d’eau, provoquant une augmentation des fluides dans les selles, et une augmentation de leur volume et de leur fréquence. Les malaises abdominaux sont aussi très courants. Les causes de la diarrhée sont nombreuses, certaines étant temporaires et d’autres découlant de maladies chroniques. Certains exemples sont l’infection, les effets secondaires des médicaments, l’intolérance au lactose, la maladie cœliaque, le syndrome de l’intestin irritable et la maladie inflammatoire de l’intestin (maladie de Crohn et colite ulcéreuse). La diarrhée touche environ de 7 à 14 % des aînés.
Gestion de la diarrhée
Il y a deux groupes de médicaments utilisés dans le soulagement de la diarrhée.
Le premier groupe consiste d’agents de masse qui fonctionnent en absorbant l’eau dans les intestins pour réduire la mollesse et la fréquence des selles. Il comprend les fibres et le psyllium (Metamucil®, Prodiem®, Benefibre®) et les agents qui lient les sels biliaires (Olestyr®).
Le deuxième groupe se compose de médicaments qui modifient l’activité musculeuse de l’intestin, ralentissant le transit du contenu et permettant à l’intestin d’absorber une plus grande quantité d’eau des selles. Il comprend les antidiarrhéiques non narcotiques tels que le lopéramide (Imodium®), les agents antidiarrhéiques narcotiques tels que le chlorhydrate de diphénoxylate et le sulfate d’atropine (Lomotil®) et la codéine, et les agents antispasmodiques comme le butylbromure d’hyoscine (Buscopan)®.
Constipation
La constipation se produit lorsque les matières fécales s’acheminent trop lentement dans le tube digestif (temps de transit colique lent). Le côlon absorbe alors une quantité excessive d’eau, créant des selles dures et sèches, provoquant une fréquence réduite des selles, des efforts à la défécation, une pression rectale ou une plénitude rectale, des ballonnements, une douleur abdominale et une sensation d’évacuation incomplète. Ces symptômes peuvent causer un faible appétit, des maux de dos, et un malaise général. Les causes comprennent un régime trop faible en fibres et en liquides, un manque d’activité physique, les effets secondaires de médicaments (p. ex., opiacés, antidépresseurs tricycliques et inhibiteurs calciques), certains suppléments (calcium et fer), le syndrome de l’intestin irritable, les occlusions ou rétrécissements intestinaux découlant d’une chirurgie, le diabète, un accident vasculaire cérébral, l’hypothyroïdisme et la maladie de Parkinson. La constipation touche 15 % de la population canadienne, mais est bien plus courante chez les personnes plus âgées, touchant 13 % de celles âgées de 30 à 64 ans, et 23 % des personnes âgées de 65 à 93 ans.
Gestion de la constipation
Une combinaison de modifications à l’alimentation et au mode de vie peut aider à soulager la constipation dans bien des cas. Consommer une quantité adéquate de fibres et boire une grande quantité de liquides ajoute de la masse aux selles, les permettant de s’acheminer plus rapidement à travers le tube digestif. Les prunes sont un aliment à haute teneur en fibres qui sont efficaces dans le traitement de la constipation et qui, de plus, contiennent des nutriments contribuant à un bon état de santé général.
Faire suffisamment d’activité physique peut aussi aider à déplacer les selles plus rapidement à travers le côlon. Vous pouvez réduire les complications de la constipation telles que les hémorroïdes en vous assurant de prendre votre temps aux toilettes et d’éviter d’effectuer des efforts en allant à la selle. Garder les pieds légèrement élevés tout en se penchant légèrement vers l’avant peut placer votre côlon en une position plus idéale pour le passage confortable des selles. Il existe des repose-pieds spécialement conçus à cet effet (p. ex., le Squatty Potty®) que vous pouvez placer devant la toilette pour surélever vos pieds de façon à vous aider à maintenir cette position.
Lorsque ces changements au mode de vie ne suffisent pas, il y a de nombreux médicaments qui peuvent aider à accélérer la durée du transit pour prévenir et soulager la constipation. On compte une grande variété de laxatifs tels que les laxatifs émollients, lubrifiants et stimulants et les laxatifs hyperosmotiques incluant les laxatifs salins, au lactulose et de polymère, et la glycérine. Les lavements peuvent aussi être utiles chez certaines personnes, mais vous ne devez les utiliser que sur la recommandation de votre médecin puisqu’ils ne sont pas aussi sûrs que d’autres traitements.
Dans les cas plus graves, un médicament sur ordonnance appelé linaclotide (Constella®) peut améliorer la consistance des selles en augmentant la sécrétion de fluide intestinal. Cela facilite le passage des selles à travers le tube digestif, soulageant les symptômes associés à la constipation.
Diverticulose colique
La diverticulose colique se produit lorsque de petites évaginations de la muqueuse du côlon en forme de sac sortent à travers la paroi externe du côlon. Ces évaginations, que l’on appelle diverticules, sont généralement de 0,5 à 1 cm de diamètre, mais peuvent parfois être plus grandes dans de rares cas. Elles se produisent le plus souvent dans la partie inférieure du côlon. La diverticulose colique est une maladie prévalente chez les personnes âgées. Elle touche 5 % de la population adulte occidentale âgée de moins de 40 ans, mais touche 50 % des personnes de plus de 60 ans et atteint 65 % de celles âgées de 85 ans et plus.
Il existe deux états principaux dans la diverticulose colique : la diverticulose et la diverticulite. La diverticulose se produit lorsqu’il y a présence de diverticules non enflammés. Elle est souvent présente sans symptômes (85 % du temps) et peut être gérée au moyen d’habitudes alimentaires saines, y compris une consommation adéquate de fibres et d’eau et un régime d’exercice modéré. La diverticulite se présente pendant une poussée active où les diverticules deviennent enflammés ou infectés, et se produit dans 10 à 25 % des cas de diverticulose colique. Les symptômes peuvent comprendre la diarrhée, des crampes, une irritabilité du côlon, aussi bien que des saignements, des ballonnements, de la fièvre, et une douleur intense et une sensibilité dans la partie inférieure gauche de l’abdomen. Le traitement de la diverticulite comprend un régime restreint en fibres ou un régime liquide pour permettre aux intestins de se reposer; des antibiotiques ou une intervention chirurgicale sont parfois nécessaires. Pour en connaître davantage, visionnez notre vidéo sur la diverticulose colique.
Cancer colorectal
Le cancer colorectal est une maladie grave et parfois mortelle. Il est plus courant chez les personnes âgées que chez les jeunes personnes, mais le risque de le développer au cours de la vie est quand même faible. Environ de 5 à 6 % de la population est touchée par le cancer colorectal et celui-ci est plus commun chez les hommes que chez les femmes. Les personnes qui sont aux prises avec la colite ulcéreuse ou la maladie de Crohn du côlon depuis plus de dix ans et celles ayant des antécédents familiaux de cancer colorectal courent aussi un risque accru de développer la maladie. Quoique tout type de cancer soit un diagnostic dévastateur, le traitement du cancer colorectal est très efficace avec un diagnostic précoce.
Il prend jusqu’à dix ans pour un cancer colorectal de se développer à partir d’un polype. C’est pour cette raison que la recommandation de subir une coloscopie chaque dix ans est une méthode de détection efficace. La coloscopie permet aux médecins de retirer tout polype dangereux avant qu’il ne devienne cancéreux. Une autre option est de procéder à une analyse annuelle de vos selles, habituellement par l’entremise du test immunochimique fécal (TIF). Votre médecin recommandera des tests additionnels si les résultats indiquent une anomalie. Assurez-vous tout simplement de subir des tests! Il est à noter que la plupart des médecins recommandent la cessation du dépistage du cancer du côlon à compter de l’âge de 75 ans ou si vous êtes aux prises avec des problèmes de santé importants.
Signes précurseurs
Si vous connaissez une apparition récente ou soudaine des symptômes qui suivent, consultez votre médecin :
- saignements/anémie
- perte de poids imprévue
- fièvre
- envie d’aller à la selle pendant la nuit
- antécédents familiaux ou personnels de cancer du côlon
L’avenir
Bien que votre risque de développer des maladies ou des troubles digestifs augmente modérément avec l’âge, un régime alimentaire équilibré, un régime d’exercice et des visites chez votre médecin pour l’informer de tous changements soudains dans le fonctionnement de votre appareil digestif peuvent contribuer énormément à son sain fonctionnement bien longtemps dans vos années de sagesse.
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