RICHARD BÉLIVEAU
Lundi, 19 juillet 2021 00:00MISE À JOUR Lundi, 19 juillet 2021 00:00
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Une étude clinique randomisée montre que l’adoption d’un mode de vie sain permet de ralentir de deux années le vieillissement biologique, tel que mesuré par les modifications épigénétiques de l’ADN.
Le vieillissement est le plus grand facteur de risque de nombreuses maladies chroniques, notamment le cancer, les neurodégénérescences, le diabète de type 2 et les maladies cardiovasculaires. Vieillir est bien entendu inévitable, mais cela ne signifie pas que nous sommes condamnés à devenir malades pour autant une fois parvenus à un âge avancé : par exemple, une étude a récemment montré que les personnes de 50 ans vivent en moyenne 23 ans sans développer de maladies chroniques.
Par contre, si ces personnes ne fument pas, maintiennent un poids normal, sont physiquement actives, mangent une abondance de végétaux, mais peu de viandes et d’aliments transformés, et consomment modérément de l’alcool, cette espérance de vie en bonne santé fait un bond de 12 ans chez les femmes et de 8 ans chez les hommes (1).
Autrement dit, au lieu de subir une perte des fonctions physiques ou mentales vers 70 ans, il est possible de retarder l’apparition de ces maladies chroniques après 80 ans et ainsi compresser au minimum la période de maladie ou d’invalidité en fin de vie. Adopter un mode de vie sain permet donc de ralentir le vieillissement biologique et ainsi d’ajouter des années de vie en bonne santé pour profiter au maximum de notre brève existence.
Modulation épigénétique
En vieillissant, plusieurs modifications sont introduites dans notre matériel génétique et modifient l’expression de certains gènes. Ces modifications, qu’on appelle « épigénétiques », prennent souvent la forme de groupements méthyles (CH3) qui sont ajoutés à une base de l’ADN (cytosine) pour soit empêcher, soit augmenter l’expression d’un gène.
Il a été observé que le degré de méthylation de certaines régions de l’ADN est fortement corrélé avec le vieillissement et des techniques d’analyse (DNAmAge) ont été développées pour estimer l’âge biologique d’une personne en mesurant spécifiquement les niveaux de méthylation de ces régions.
Une étude clinique randomisée a utilisé cette approche pour visualiser l’impact du mode de vie sur le vieillissement biologique (2).
Dans cette étude, 44 hommes âgés de 50-72 ans en bonne santé ont été séparés en deux groupes, soit un groupe contrôle, sans modification aux habitudes de vie, et un groupe d’intervention soumis à un programme préconisant une hausse de l’apport alimentaire en végétaux, une activité physique régulière (30 minutes par jour, 5 jours par semaine), une gestion du stress (exercices de respiration) et un sommeil d’au moins 7 heures par nuit. Des échantillons de salive ont été prélevés auprès des participants au début de l’étude et après 8 semaines d’intervention et utilisés pour mesurer la méthylation de l’ADN.
Pas une question de génétique
Les résultats sont assez spectaculaires : les participants soumis au protocole expérimental montrent une réduction du score DNAmAge de presque 2 ans comparativement à celui mesuré au départ, ce qui suggère que le mode de vie peut très rapidement renverser le vieillissement biologique, tel que mesuré par le degré de méthylation de certaines régions de l’ADN. Les bienfaits des bonnes habitudes de vie sur la santé ne sont donc pas un concept abstrait ou théorique, mais peuvent au contraire se manifester concrètement, au niveau même de nos gènes.
Le secret des gens qui vivent longtemps et en bonne santé n’est donc pas une question de génétique, mais bel et bien d’épigénétique, c’est-à-dire l’ensemble des facteurs associés au mode de vie qui, collectivement, module l’expression de nos gènes. C’est encourageant, car cela signifie que notre destin n’est généralement pas fixé à la naissance et qu’on peut vraiment prendre sa santé en main en modifiant nos habitudes de vie.
♦ (1) Li Y et coll. Healthy lifestyle and life expectancy free of cancer, cardiovascular disease, and type 2 diabetes: prospective cohort study. BMJ 2020; 368: l6669.
♦ (2) Fitzgerald KN et coll. Potential reversal of epigenetic age using a diet and lifestyle intervention: a pilot randomized clinical trial. Aging 2021; 13: 9419-9432.
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